Association de protection de l'environnement,
http://agirvite.free.fr
mail:agirvite@free.fr Grenoble, le 16 juin 2005
L.O.E. article 10 ter. (Energie éolienne)
Monsieur le Député, membre de la Commission Paritaire Mixte (LOE)
L'association AGIR VITE, sans but lucratif et strictement indépendante de tout parti ou syndicat, a la particularité fortuite de compter en son sein un certain nombre de compétences professionnelles en matière d'énergies renouvelables.
C'est à ce titre, qu'informés le 26 mars d'un article paru dans Le Figaro, nous étions en mesure de vous adresser le jour même un courriel intitulé
« Le chiffre avancé par votre collègue OLLIER est faux. »
Nous y démontrions, fichier téléchargé du site d'EDF à l'appui , que son assertion écrite (reproduite par Le Figaro) selon laquelle
« 95% de notre énergie électrique est produite sans gaz à effet de serre grâce au nucléaire et à l'hydroélectrique »
n'était pas conforme aux faits, et il s'en fallait même de beaucoup. .
En effet, elle revenait à prétendre que notre production d'électricité à partir de combustibles fossiles ne représentait que 5% du total, alors que l'on pouvait déduire du fichier EDF(*) que
cette proportion était nettement supérieure à 9,8 %, et même à 10,5% de nos besoins si l'on tenait compte du solde net d'énergie électrique exportée.
La journaliste du Figaro explicitait ce nouveau prétexte OLLIER contre l'éolien français en ces termes :
«En clair, un petit peu d'éolien ajouté à d'autres énergies renouvelables suffira grandement à fournir les 5% manquants ».
Nous vous prions de bien vouloir trouver ci-après un argumentaire plus étoffé, tenant compte des réactions reçues d'un certain nombre de parlementaires.
--------------------------------
Parmi les treize députés qui nous avaient fait connaître leur position sur ce problème, il en figurait cinq qui ont soutenu l'amendement, Messieurs De ROUX, ROUBAUT , MOURRUT, COLOMBIER et MARIANI.
1)-- Sur l'argument de Monsieur Patrick OLLIER
Aucun de ces cinq derniers ne contestait que l'argument chiffré sur lequel Monsieur OLLIER s'était appuyé s'était révélé faux.
2)-- La France, pays d'Europe occidentale arriéré en matière d'énergies renouvelables.
Entre autres choses, Monsieur COLOMBIER nous avait écrit :
« Contrairement à ce qui est affirmé, l'objet de cet amendement n'est en aucun cas de stopper l'éolien en France mais simplement de permettre son développement qui aujourd'hui reste trop lent. »
De telles contre-vérités (il y en a deux en trois lignes) sont tout simplement révoltantes.
A titre d'illustration de notre affirmation, le cas de la Région Bretagne est caractéristique : elle a recensé 163 projets éoliens, pour une puissance nominale installée de 930 MW (mégawatt), soit une moyenne de 5,70 MW par projet.
Il n'y en a donc que très peu, ou même peut-être aucun, à dépasser les 20 MW.
Donc, selon la volonté de Messieurs OLLIER, COLOMBIER et autres,
il aurait fallu tous les jeter à la trappe !
Même si seulement la moitié de ces projets devait se réaliser, soit 415 MW, cela triplerait presque la puissance éolienne qui était installée en France à fin 2003, qui était de 239 MW selon certaines sources, 253 MW selon d'autres.
Ceci pourra sembler énorme à première vue, mais ce ne serait en fait qu'un très modeste début de rattrapage, tant l'on sait qu'à la même date, le Danemark, pays douze fois plus petit que le nôtre, en était à 3.110 mégawatt, et l'Espagne, à 6.202 mégawatt.
Nous n'aurons pas la cruauté de faire état des chiffres de l'Allemagne !
La modestie d'un tel accroissement de 415 MW, et en plusieurs années, serait à comparer à ce qui a été effectivement réalisé en Espagne dans la seule année 2003 : 1.377 mégawatt , soit 3,3 fois plus!
3)- La protection des paysages
Monsieur CHRIST, autre député UMP qui avait voté l'amendement OLLIER modifié, écrivait à l'un de ses électeurs, le 30 mars (extrait)
« Ce dispositif (me paraît) aussi attentif au développement des énergies renouvelables qu'à la protection des paysages des campagnes françaises et de notre littoral. Pour mémoire, 31 permis de construire ont été annulés à la mi-mars dans le Pas-de-Calais, en raison d'une forte opposition locale de riverains à des projets d'Eoliennes ».
Monsieur CHRIST a ainsi apporté lui-même les preuves :
a) Qu'il n'y avait pas lieu de légiférer pour protéger les paysages d'éoliennes incompatibles, puisque les populations et leurs Maires y arrivent fort bien sans autres textes.
b) Que la protection des paysages n'était qu'un prétexte en cette matière.
3) Une action qui s'oppose à de nombreuses et rapides créations directes d'emplois non délocalisables,
La revue de la section canadienne de l'IEEE (Institute of Electrical and Electronics Engineers), société savante de renommée mondiale, a publié dans l'été 2002 un tableau des emplois directs générés par chaque filière, rapportés à l'énergie produite.
Nous reproduisons le tableau dans son intégralité :
Technologie Emplois/TWh/an
Nucléaire 100
Géothermale 112
Charbon 1 16
Thermie solaire 248
Eolienne 542
(TWh , pour térawatt.heures)
On constate que l'énergie éolienne est incomparablement plus génératrice d'emplois directs que toute autre filière, dans des rapports qui vont de 5 à 30 par unité d'énergie électrique produite. Il est notoire qu'une part de ces emplois est locale et à long terme, car liée à la maintenance courante des machines. Là encore, il s'agira d'un bienfait pour des habitants de secteurs ruraux .
Le même article de 2002 signalait que le prix de revient du kwh éolien n'avait pas fini de baisser, et qu'il se situait déjà alors entre 4 et 6 centimes d'USD, soit de 4,5 à 6,75 centimes d'euro/kwh, compte tenu du (haut !) cours du dollar de cette époque.
L'éolien devient de plus en plus compétitif, et ses perspectives économiques sont telles qu'un énorme développement de cette technique est inéluctable, y compris en France.
Selon l' « Observatoire des Energies Renouvelables », pendant la seule année 2003 il s'est installé 7.860 MW éoliens dans le monde. Ceci correspond à un rythme de croissance annuelle de 25 % !
Y a-t-il beaucoup d'autres marchés présentant un tel taux de croissance ?
Et pourtant, aucune de ces machines n'a été construite par une société française !
On déduit des informations données par la même sourcre, que les trois firmes espagnoles spécialisées, elles, ont fait en 2003 un chiffre d'affaires largement supérieur au milliard d'euros, avec un effectif d'environ 2000 salariés.
La nature et les localisations qéographiques diffuses, majoritairement littorales, des productions éoliennes, ont l'avantage supplémentaire d'injecter du courant en « bouts de réseaux », loin des grosses centrales. Ces productions sont et seront consommées à courte distance , soulageant d'autant le réseau de distribution, et économisant une partie de l'énergie actuellement perdue par échauffement des lignes électriques.
L'opposition actuelle au développement de l'éolien est le prolongement d'un combat d'arrière-garde, qui avait déjà eu pour conséquence de casser cette filère industrielle en France au moment même où elle pouvait devenir florissante. C'est ce qu'a montré ce qui s'est passé ensuite dans plusieurs pays voisins.
Elle a déjà privé notre Pays d'un développement industriel intéressant, et des créations d'emplois qui en auraient résulté.
Ce type d'opposition est une opposition au progrès.
4) Une action contre l'intérêt général , et celui de nombreuses populations et communes rurales
Le même Monsieur CHRIST affirmait
« Ce dispositif ne me paraît pas, au final, répondre aux intérêts particuliers de quelque groupe de pression que ce soit, mais bien à l'intérêt général ..(?) . »
Or, on ne peut que constater que :
a) Déjà l'an dernier, la même majorité de députés avait voté une diminution du budget de l'ADEME, dont une des conséquences ultimes est l'abandon de tous les projets photovoltaïques particuliers. Nos adhérents concernés peuvent en témoigner.
b) L'amendement de dernière minute de Messieurs OLLIER & autres avait été doublé, le 21 mars, d'une question écrite de Monsieur ROUBAUT au Ministre de l'Environnement, sur la nécessité qu'il y aurait de protéger les paysages contre les éoliennes dans son secteur.
Quand on sait que Monsieur ROUBAUT est le député de la circonscription du Gard qui comprend le Centre Atomique de Marcoule, son bassin d'emplois, et les résidences d'une partie des personnels du complexe électronucléaire du Tricastin et d'une partie de celui de Cruas-Meysse, on est en droit de se demander si ce député était vraiment dans les meilleures conditions d'objectivité pour défendre l' « intérêt général » en cette matière.
Il est clair aux yeux de la plus grande partie de l'opinion, que ces agissement là n'avaient pour objet que de défendre les intérêts particuliers du lobby électro-nucléaire, en freinant le développement de toute concurrence indépendante.
c) Des centaines de communes rurales se trouvent dans des régions où le climat est dur du fait de la persistance et de la force des vents. De tous temps, ces régions ont eu à souffrir des contraintes humaines et agricoles dues à ces climats locaux ( nécessités de créer et entretenir des haies, ou des murets là où le vent est tellement fort que la végétation ne pousse pas, adaptation lourde des habitations, longs isolements dus aux congères en Ardèche et ailleurs, etc..)
A ces populations et à leurs communes défavorisées, une manne allait enfin tomber du ciel ! Et voilà qu'un groupe de députés voudrait leur retirer le pain de la bouche ?
d) Des milliers de lieux ruraux ont un potentiel éolien petit ou moyen, compatible avec la protection des sites, des vues remarquables, des monuments classés, et du bien-être des habitants.
Organiser l'impossibilité légale de les équiper, c'est refuser une possibilité de revenus supplémentaires récurrents et sûrs à des milliers d' agriculteurs, susceptibles de rentabiliser leur exploitation (location, royalties, ou même exploitation en pleine propriété).
Il faut ajouter à cela que ces agriculteurs pourront continuer à élever et/ou cultiver jusque sous les machines, puisque les socles bétonnés de celles-ci peuvent être enterrés.
Dans l'espoir que notre modeste contribution aura permis de relativiser certains arguments par rapport à d'autres, nous vous prions d'agréer, Monsieur le Député, l'expression de notre haute considération.
Le Bureau d'Agir Vite
|