Association de Sauvegarde de la Theillay, le 2 juillet 2004
Sologne Rurale et Touristique
4, Place de l'Eglise,
41300 - THEILLAY
Réf. : ASTFNA4001
Monsieur le Président,
Monsieur le Secrétaire Général
et Chers Amis de toutes les Associations, Membres de la FNASSEM
Nous avons plusieurs fois lu dans le courrier toujours si sympathique de notre honorable Fédération des allusions graves à une campagne contre les éoliennes. Nous comptons parmi nous des scientifiques, physiciens, médecins et même des écologues qui, s'imposant une déontologie rigoureuse dans toutes les études qu'ils ont entreprises depuis 1970 sur l'énergie et la sauvegarde des sites et de la biosphère, se sont toujours tenus à l'écart de tout engagement et idéologie politique politicienne, ou de recherche de profits de quelque nature que ce soit, pour défendre au contraire le bien fondé et l'urgence du développement et de l'installation des éoliennes en France.
Pourquoi ? Le pétrole et le Nucléaire sont devenus les deux fléaux de l'Humanité. Et en France, le pays le plus nucléarisé du monde avec 18 centrales nucléaires et 58 réacteurs, nous sommes devenus vulnérables pour plusieurs raisons :
1) insuffisance de refroidissement des tours en période de canicule ;
2) cumule excessif et non recyclable de déchets de plutonium 239 majoritaire ;
3) l'énergie nucléaire, cible de choix du terrorisme :
a) fait d'un réacteur une bombe ;
b) fait d'un seul pylône de THT détruit, une coupure de l'alimentation centralisée d'une ou plusieurs régions,
c) la destruction simultanée à distance d'un seul pylône des 18 centrales plonge toute la France dans le noir et la paralyse.
Si nous devons protéger et restaurer les sites merveilleux de la France et la richesse de nos patrimoines historiques, la priorité des priorité en ce nouveau millénaire est de réduire considérablement la consommation des hydrocarbures et huiles lourdes pour les transports et de l'uranium pour les centrales électriques. De nombreux ouvrages récents de savants de par le monde ont déjà, et avec de plus en plus d'insistance, alerté les nations et leurs dirigeants en leur montrant que notre Planète en était malade que la vie de toutes les espèces et celle de l'homme en particulier étaient menacées.
Pour ne citer que l'effet de serre qui, avant les émissions exagérées de gaz, était un bien pour l'homme pour autant qu'il en était digne sans le savoir, par la sagesse forcée de se contenter de combustions limitées et raisonnables de bois, de charbons et de pétrole lampant, ce phénomène naturel nous fait soudain prendre conscience des danger de tant d'excès, par convoitises des biens et des pouvoirs et des lourdes responsabilités prises par ignorance ou insouciance criminelle. Ainsi toutes ces erreurs de l'homme moderne sont la cause des changements climatiques qui détruisent des sites, des monuments et qui tuent.
Le pire est l'inconscience de l'exploitation de l'énergie nucléaire. Nous savons que sur notre Planète, vieille de 4,5 milliards d'années, se trouvaient tous les transuraniens y compris le plutonium 239 mortel pour toutes espèces organiques, les animaux qui n'existaient pas encore ni les humains. Mais par leurs périodes de décroissance radioactive respectives ce dernier n'existait plus sur la Terre lorsque, par le processus d'évolution, les premiers hominiens apparurent il y a 3 millions d'années. En effet sa période de décroissance, dite de demi-vie, n'est que de 24.360 ans. L'environnement était enfin favorable à la vie. Seul l'uranium 238 beaucoup moins dangereux a une décroissance qui a la même durée que l'âge actuel de la Terre, c'est-à-dire de 4,5 milliards d'années, tandis que ses divers isotopes ont une décroissance de quelques années, certains de quelques mois et d'autres de quelques jours (l'uranium 240 se singularise par une période de 14 heures 10 minutes seulement) ; Hélas, comme vous savez, l'homme du 20ème siècle, pour une finalité militaire qui a marqué notre Histoire, est parvenu à libérer l'énergie considérable de l'atome. Si, pensait-on, cet exploit extraordinaire avait pu être orienté vers des fins pacifiques, cette découverte aurait été un bien pour l'avenir de l'humanité, mais on ne peut tricher avec les lois immuables de la physique : toute réaction de fission dans un réacteur nucléaire, quelle que soit la technologie employée, recrée à nouveau dans ses déchets ce maudit plutonium qui n'existait plus pour le plus grand bienfait de la vie sur Terre. Et maintenant on ne sait plus qu'en faire. Les savants géologues sont unanimes à déclarer qu'il n'existe aucun site géologique sur Terre, dans la croûte terrestre, qui puisse permettre de stocker sans danger le plutonium, même dans des containeurs sophistiqués et à des profondeurs contrôlées. Il constitue une menace de mort pour toutes les générations futures.
Aujourd'hui encore notre avenir est assurée par notre soleil, et tant que ce réacteur naturel de fusion thermonucléaire existera dans l'espace et fera vivre la biosphère, l'énergie qu'il dispense à la surface de la Terre qui est de l'ordre de 1018 kwh par an (un milliard de milliards de kilowattheures par an), est plus de 10.000 fois supérieure à celle consommée par toute l'humanité industrialisée actuelle qui est aujourd'hui d'environ 0,75 x 1014 .kwh par an (75 mille milliards de kilowattheures par an).
La conversion mécanique de son énergie thermique, à la surface de la Planète, est le vent. Et l'énergie éolienne considérable fournie est sensiblement égale à celle consommée par l'humanité industrialisée actuelle. Nos ancêtres l'avaient compris. La splendeur des navires à voiles et la beauté rustique des moulins à vents étaient l'oeuvre et la marque la plus rassurante du génie de l'homme pour les générations à venir. Et d'autres conversions naturelles d'énergie exploitées par l'homme embellissaient les monts et les vallées et certaines baies côtières : les moulins à eau des cascades et des rivières et ceux des marées. D'autres ont su domestiquer la géothermie sans égratigner nos sites paysagers.
Alors, on ne peut accepter ces réticences, ces hésitations, ces prétextes non fondés, ces procès d'intentions supposées, pour refuser des champs d'éoliennes qui ne polluent pas et qui ne tuent pas, surtout lorsqu'il est question de les implanter dans des régions où autrefois les moulins à vents étaient légions et animaient le paysage. Même si les éoliennes prenaient avantageusement la place du million de pylônes de hautes et très hautes tensions qui défigurent la France et qu'elles soient aussi grandes, elles seront plus esthétiques et plus sympathiques. Il importe de souligner que les lignes de distribution d'énergie alimentées par les éoliennes ne transportent ni de Très Hautes Tensions ni de Hautes Tensions mais, à l'extrême, des Moyennes Tensions. Toutes ces lignes sont alors enfouies. Elles offrent l'avantage d'une parfaite sécurité et de ne pas dégrader le paysage. Pourquoi ferait-on campagne contre les éoliennes là où les pylônes géants ( qu'elles feront progressivement disparaître ) et les tours géantes de refroidissement des centrales nucléaires ont été tolérés sans réserve alors que tous deux dégradent outrageusement nos paysages et que les dernières, sont vulnérables dans un monde dangereux, car les centrales nucléaires constituent pour tout adversaire déterminé des moyens potentiels de destruction massive de notre propre Pays.
Enfin par une volonté de réduction des gaz à effet de serre à l'échelle communautaire, le Livre Vert de la Commission européenne de novembre 2000 a mis en avant la nécessité de développer les sources d'énergie renouvelables. Et sa directive 2001/77/CE du 27 septembre 2001 encourage fortement le développement de l'éolien en France. Et nous nous sommes engagés, à l'époque, à produire de cette façon 21% de notre électricité, soit une augmentation de 6% par rapport à la situation qui prévalait alors, quand 15% de notre électricité était déjà produite à partir d'énergie s renouvelables.
On sait que l'énergie hydraulique ne nous permettrait plus d'atteindre un tel objectif. Il n'existe plus de sites possibles pour construire des barrages en France.
En conséquence, il a été retenu par le Sénat qu'il faudra s'appuyer, pour l'essentiel, sur l'énergie éolienne.
Ainsi dans sa session extraordinaire de 2001-2002, N° 360, une proposition de loi fut présentée au Sénat, par M. Jean-François LE GRAND, relative à l'implantation des éoliennes et à la protection de l'environnement. Cette loi disposait les points suivants :
A) soumettre les projets d'éoliennes de plus de douze mètres à une étude d'impact ;
B) soumettre les projets d'éoliennes de plus de douze mètres à une enquête publique.
Et préconisait à la Commission économique :
A) Faire rentrer les éoliennes dans le droit commun ;
B) Assurer la protection de l'environnement et du paysage en unifiant le cadre procédural ;
C) Prévoir des garanties de remise en état du site en fin d'exploitation.
Enfin l'Annexe II de cette loi a présenté un tableau de modulation du tarif de rachat de l'électricité produite par les éoliennes qui était de 8,38 euros par kilowattheure en 2002, pour une durée annuelle de fonctionnement de 1.900 heures et moins à 3.300 heures et plus, pendant les 5 premières années, puis diminuant par extrapolation linéaire à 4,42 euros par kilowattheure au bout de 16 ans et au-delà.
Et la loi fut votée en séance du Sénat, le 24 octobre 2002, créant par suite la Loi du 2 juillet 2003 :
Article L.421-1-1, du Code de l'urbanisme (inclus dans l'Article L. 553-1 du Code de l'environnement, Loi du 2 juill. 2003): faisant obligation d'un permis de construire pour les éoliennes d'une hauteur supérieure ou égale à 12 mètres.
Article L.553-2 du Code de l'environnement ( 2 juill. 2003 ) : faisant obligation d'une étude d'impact et d'une enquête publique pour l'implantation d'une ou plusieurs installations d'éoliennes excédant 2,5 mégawatts
Article L.553-4 du Code de l'environnement ( 2 juill. 2003 ) : disposant, nous citons :
« I.- Afin de promouvoir un développement harmonieux de l'énergie éolienne, les régions peuvent mettre en place un schéma régional éolien, après avis des départements et des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre concernés. Ce schéma indique les secteurs géographiques qui paraissent les mieux adaptés à l'implantation d'installations produisant de l'électricité en utilisant l'énergie mécanique du vent.
II. ? Les services de l'État peuvent concourir à l'élaboration de ce schéma à la demande du conseil régional. »
Alors nul n'est censé ignorer la loi. Si l'on veut transmettre à nos enfants et petits enfants des conditions de vie saines et ne pas hypothéquer leur sécurité de vie, ni défigurer ou détruire le patrimoine dont ils devraient hériter, nous devons accepter quelques petits sacrifices concernant la beauté de certains paysages. L'équilibre des lois physiques et biologiques de l'Univers qui nous entoure nous imposera sans doute plus souvent ce choix : "le patrimoine ou la vie". Et pour cela, tous les passionnés d'histoires et amoureux des vieilles pierres que nous sommes devrons raison garder, ne pas se laisser égarer par des Don Quichotte qui veulent nous entraîner dans une guerre contre les moulins à vent. Les intentions de certains d'entre eux, on le sait, ne sont pas innocentes. Ils défendent d'autres causes que celles de la sauvegarde des sites et du patrimoine.
Veuillez bien nous excuser si nous nous sommes sentis le devoir d'intervenir et de nous opposer à la déclaration surprenante et quelque peu décevante de M. Nicolas HULOT,. Loin de nous, bien sûr l'incongruité de penser qu'il serait un Don Quichotte, mais, sauf le respect que nous lui devons, surtout pour la merveilleuse expérience d'explorations écologiques que nous lui connaissons, il nous semble bien mal informé sur la parfaite légalité, les meilleures intentions et la parfaite honnêteté de ceux qui défendent à la fois la vie et le patrimoine mais donne à la vie la priorité absolue en sollicitant l'installation urgente des éoliennes car c'est la vie de nos héritiers qui est en jeu.
Nous vous prions de croire, Monsieur le Président, à l'assurance de nos sentiments associatifs les plus fidèles.
Bernard O. PIERRE Fernand BONNET
Dr. Sc. Physiques Président de l'ASRT
vice-président de l'ASRT
|